Ovechkin, flamme vacillante
Un échec retentissant. Mercredi, l’équipe russe est sortie par la petite porte du tournoi de hockey des Jeux olympiques de Sotchi, butant au stade des quarts de finale sur un adversaire finlandais bien plus cohérent (1-3). Et si la défaillance a été généralement collective, les prestations d’un homme cristallisent logiquement les critiques : Alexander Ovechkin.
Tout était réuni pour faire de lui la grande star des Jeux. Une épreuve mythique organisée sur ses terres, un peuple uni derrière son équipe, la perspective d’une succulente revanche face aux Canadiens, un statut d’icône nationale. Buteur sur son premier shift puis auteur d’une passe quelques minutes plus tard pour Evgeni Malkin en ouverture contre la Slovénie, Alexander Ovehckin a ensuite complètement disparu des lignes statistiques. A l’heure des explications, l’entraîneur russe, Zinetula Bilyaletdinov a, certes maladroitement, jeté son leader dans la fosse aux lions. Il reste que, si le joueur des Washington Capitals ne peut être tenu comme l’unique coupable, sa part de responsabilité ne doit être ni éludée, ni minimisée. D’autant que ce fiasco est loin d’être le premier dans la carrière du célèbre numéro 8.
Les mauvaises habitudes perdurent
Arrivé en 2005 du côté de Washington, Ovechkin a été le grand artisan du retour aux affaires de la franchise de la capitale américaine. Vainqueurs à cinq reprises de la division Southeast lors des six dernières années, avec en point d’orgue un Presidents’ Trophy glané en 2010, les Caps se sont imposés, dans le sillage de leur fer de lance russe, comme une solide référence à l’Est.
Toutefois, ces performances encourageantes n’ont jamais trouvé quelconque écho en séries. Washington n’est, en effet, jamais parvenu à passer le cap des demi-finales de conférence et le rendement d’ « Ovi » à ce niveau de compétition soulève des interrogations légitimes. L’ailier russe semble incapable de se sublimer pour propulser son équipe vers les sommets. Un constat également valable sur la scène internationale où, après l’humiliation de Vancouver (défaite 7-3 en quarts de finale face au Canada), le désastre de Sotchi sonne comme un terrible désaveu pour le joueur formé à l’école du Dynamo Moscou.
Un prototype unidimensionnel ?
Sur les glaces olympiques, son incapacité à briller sous la pression a ressurgi au grand jour. Le staff de l’armée rouge n’a, sans doute pas, utilisé son potentiel à bon escient – son placement sur le jeu de puissance et sa connexion infructueuse avec un Evgeni Malkin lui aussi très décevant étant des arguments recevables – mais Ovechkin est le principal responsable de son naufrage.
Cherchant de manière trop systématique à faire la différence individuellement, manquant de discernement et de précision dans ses choix (1 but pour 21 tirs), parfois nonchalant, incapable de mettre en valeur ses coéquipiers, le chef de file a manifestement failli dans sa tâche. Ces lacunes affichées sont, pour autant, loin d’être une nouveauté pour le numéro un de la Draft 2004 qui, s’il représente le prototype ultime du hockeyeur moderne, laisse la désagréable impression qu’il est finalement un joueur unidimensionnel. Un phénomène pouvant enfiler les buts à un rythme fou et ajoutant une dimension physique unique à sa palette mais si peu inspiré lorsqu’il s’agit de mettre ses incroyables qualités naturelles au service du collectif.
Milbury : « Il doit devenir un érudit du jeu »
Dans un billet publié sur son blog avant les Jeux, Jeremy Roenick mettait en avant le manque de structure du jeu d’Ovechkin, lui qui fournit des efforts trop désordonnés, notamment dans l’aspect défensif. Une analyse qui ramène au fait que le Russe manquerait finalement de « QI hockey » et ne serait, dès lors, pas à même d’élever son niveau quand les circonstances l’exigent.
« Nous avons vu sa production, nous avons vu sa puissance, nous voyons clairement son incroyable propension à marquer des buts. Mais je n’ai pas vu le joueur évoluer au fil des ans, a surenchéri Mike Milbury, ancien défenseur des Boston Bruins, sur les ondes de NBC. Il a besoin d’apprendre, de devenir un érudit, de se passionner pour le jeu. Il ne doit pas se focaliser uniquement sur ses propres performances mais se concentrer sur les résultats de son équipe et la façon dont il peut rendre ses coéquipiers meilleurs. Actuellement, je ne pense pas qu’il emprunte ce chemin. »
La critique est cinglante mais renvoie à une réalité palpable. Encore une fois, à Sotchi, l’étoile russe est passée complètement à côté de son sujet lors d’une épreuve où elle jouait très gros. A 28 ans, le serial buteur a encore le temps et dispose du talent pour inverser la tendance. Il serait néanmoins inspiré de ne pas traîner en route. Car, si la frontière est parfois ténue entre les bons et les grands joueurs, le fossé se creuse chaque fois encore un peu plus et dans le mauvais sens pour Alexander Ovechkin.