Les joyaux de la couronne
Ils sont jeunes, pétris de talent et représentent l’avenir au poste de défenseur en NHL. Points communs : ils sont tous suédois et patinent dans le sillage tracé pour eux par Borje Salming et Nicklas Lidstrom. Focus sur quatre de ces pépites incarnant une génération en or massif.
Dans les années 1970, il avait ouvert la voie. Premier Européen issu du cru à avoir un impact significatif en NHL, Borje Salming (787 points en 1148 matches, disputés essentiellement sous les couleurs des Toronto Maple Leafs) s’était mué en véritable pionnier. « The King » a passé le flambeau à son compatriote Nicklas Lidstrom qui, au travers d’une carrière majestueuse longue de vingt saisons, s’est imposé comme la référence ultime à son poste. L’ancien capitaine de Detroit a été une source d’inspiration unique pour une vague de jeunes défenseurs suédois qui déferle actuellement dans les patinoires nord-américaines. Des héritiers bien décidés à suivre les traces de leurs glorieux aînés tout en perpétuant la tradition de la qualité made in Sweden au sein de la plus prestigieuses des compétitions.
Erik Karlsson (24 ans, Ottawa Senators) : le surdoué
A la question de savoir qui était le meilleur blue-liner actuel en NHL, Nicklas Lidstrom n’a pas eu la moindre hésitation au moment de répondre : Erik Karlsson. Comme une évidence. Une filiation spirituelle enveloppe les deux joueurs et le joyau d’Ottawa ne peut laisser insensible. Son aisance sur la glace, la qualité de ses choix en transition et sa capacité à cornaquer avec brio le jeu de puissance en font un phénomène à part entière. Sollicité par Slapshot, Peter Harling, rédacteur pour The Hockey Writers et spécialiste des Senators, ne tarit par d’éloges sur le 15e choix de la Draft 2008 : « C’est un défenseur élite. Ses principales forces sont sa vitesse et son QI hockey. Regarder Karlsson avec le palet me rappelle l’un des meilleurs de tous les temps, Bobby Orr, s’enthousiasme-t-il. Je pense qu’il va continuer sa progression et s’inscrira dans la lignée des plus grands, Orr, Lidstrom, Harvey, Pronger ».
Malgré un Trophée Norris décroché en 2012, Karlsson n’est, pour autant, pas encore un produit fini. Son extrême facilité lui joue parfois de mauvais tours et l’on attend plus de pugnacité de sa part sur le plan strictement défensif – en témoignent des statistiques parfois suspectes en plus/minus. Son sens de l’anticipation et son placement sont également à étoffer mais, à 24 printemps, un avenir doré se dessine devant lui. Pour rappel, Nicklas Lidstrom avait dû attendre de souffler ses 31 bougies pour obtenir son premier Norris.
Oliver Ekman-Larsson : (23 ans, Arizona Coyotes) : la force tranquille
En toute discrétion, il est en train de s’affirmer comme l’une des belles références à son poste en NHL. Joueur ultra-complet, rapide, endurant, doté d’une excellente vision – lui qui a évolué en position de centre à 15 ans –, d’un tir puissant et dévoilant de réels gages d’assurance défensive face aux adversaires les plus menaçants, « OEL » fait mieux que confirmer les attentes nourries d’un repêchage au 6e choix de la Draft 2009. Évoluant dans un petit marché, à Phoenix, il ne bénéficie toutefois pas d’une couverture médiatique à la hauteur de son talent. Qu’importe, ses adversaires comme ses coéquipiers savent parfaitement à qui ils ont affaire.
« Je ne sais pas s’il y a trois joueurs dans la Ligue contre qui j’échangerais Oliver. Je ne sais même pas s’il y en a un, il est tellement fort », a ainsi déclaré son capitaine, Shane Doan, dans les colonnes du Edmonton Journal, avant d’être appuyé par Derek Morris : « Dans une équipe plus exposée, on parlerait de lui tous les jours. Défensivement, au même âge, il est comme Lidstrom ». Ces compliments ne devraient cependant pas monter à la tête du flegmatique Ekman-Larsson. Sans faire de bruit, le numéro 23, focalisé sur ses objectifs, poursuit une progression constante qui devrait l’emmener non loin des sommets.
Victor Hedman (23 ans, Tampa Bay Lightning) : la confirmation attendue
Enfin, il a pris son envol ! Deuxième choix d’une Draft 2009 particulièrement épaisse, derrière John Tavares mais devant Matt Duchene, Victor Hedman débarquait dans la cour des grands entouré d’énormes attentes. Toutefois, malgré ses larges épaules (1,98 m, 106 kg), le colosse formé à MODO a eu bien du mal à exploser. Celui qui était présenté comme le nouveau Chris Pronger, malgré quelques fulgurances, a connu plus de bas que de hauts lors de ses quatre premières années en NHL. En cause, son jeune âge, les difficultés à s’acclimater à une nouvelle culture et à apprivoiser le jeu nord-américain et, ainsi qu’il le reconnaît volontiers, un engouement à son égard n’ayant pas été aisé à gérer.
Déterminé, Hedman, pas épargné par les critiques, a pris son mal en patience et le déclic s’est produit la saison passée. Auteur d’un exercice particulièrement accompli (55 points en 75 matches), le Suédois a clairement franchi un palier. Évoluant dans un registre où on ne l’attendait pas forcément, le joueur, qui déclare trouver ses sources d’inspiration en Scott Niedermayer et Nicklas Lidstrom, s’est mué en fer de lance de l’arrière-garde du Lightning. Loin d’être un prototype unidimensionnel se reposant sur son physique, Hedman veut s’inscrire dans un terreau scandinave pourvoyeur de défenseurs fins techniquement et capables de générer des offensives dangereuses. « Je ne suis pas Zdeno Chara. Je ne pense pas non plus jouer comme Chris Pronger. Je ne suis pas vicieux. Je dois travailler sur ses aspects de mon jeu, évidemment, mais je suis un défenseur mobile qui peut patiner avec le palet, a-t-il confié, lucide, au National Post. Mon développement a pris plus de temps que prévu. Mais je suis toujours jeune, j’apprends encore et je travaille tous les jours pour m’améliorer. » Désormais libéré, Victor Hedman a tous les atouts en main pour devenir incontournable à son poste dans les années à venir.
Hampus Lindholm (20 ans, Anaheim Ducks) : la révélation
Le portrait dépeint par ses dirigeants et ses coéquipiers est le même. Du feu dans les jambes contrastant avec le sang-froid qui coule dans ses veines, une intelligence supérieure dans ses options de jeu et une personnalité posée qui s’intègre parfaitement au collectif. L’image d’un vétéran ayant au compteur une bonne dizaine de saisons au plus haut niveau, en somme. Sauf que le garçon en question est un certain Hampus Lindholm qui, à 20 ans, vient seulement de connaître son baptême du feu en NHL.
Affichant une maturité impressionnante sur et en dehors de la glace, le jeune Suédois est parvenu à se faire une place au soleil dans l’alignement des Ducks. Capable de briller dans toutes les situations, le numéro 6 de la Draft 2012 a engrangé 30 points sur son passage en plus de signer un retentissant + 29 au ratio plus/minus, des performances lui ayant permis d’intégrer logiquement l’équipe des meilleurs débutants de l’année. Doté d’une étonnante force de caractère, le gamin d’Helsinborg sait parfaitement où il veut aller et ne se fixe aucune limite. « Je sais que si j’avais enchaîné les erreurs, j’aurais été sorti, mais ce n’est pas arrivé. En partie parce que je suis plus dur envers moi-même que les autres, a-t-il expliqué au LA Times. Mes objectifs sont plus élevés que ce que les gens pensent. Peu importe ce qu’ils disent, je me mets déjà la pression. Et je sais ce que je peux réaliser. Je suis comme ça. » Prometteur, vous avez dit ?
Article paru dans le Slapshot Mag n° 73